lundi 2 juillet 2018

CINEMA : Petit Paysan d'Hubert Charuel

Petit Paysan de Hubert Charuel, France, 2017, 90 min.

        Dans Petit Paysan nous retrouvons un protagoniste trentenaire, Pierre. Il est agriculteur, il a repris l’exploitation de ses parents. Sa vie paysanne va basculer lorsque sa sœur, vétérinaire, va déceler une maladie incurable et contagieuse à son troupeau de vaches. Dans ce premier film cathartique, le jeune réalisateur, Hubert Charuel, montre que l’exotisme est partout. Même dans ces villages reculés où les vaches sont plus nombreuses que leurs habitantes et habitants.




Les années 90 ont été ravageuses pour le monde paysan. Vache folle, fièvre aphteuse, de nombreuses fermes ont vu leurs portes se fermer. Hubert Charuel dresse un portrait émouvant de cette réalité crue. Lorsqu’une ferme se termine, il n’est pas question uniquement d’un bâtiment, il est également question d’une vie qui s’arrête aux mêmes portes. Lors d’une masterclass dans son ancienne école, l’Institut Européen du Cinéma et de l’Audiovisuel de Nancy, le réalisateur confie que cette fiction a une part autobiographique. En effet, il a lui même travaillé dans la ferme de ses parents. Ces derniers jouent d’ailleurs leurs propres rôles dans cette œuvre cinématographique qui peut donc être considérée comme une autofiction.

Le spectateur est happé par la représentation de ce monde agricole qui est si peu représenté grâce au genre du thriller. Le point de vue est essentiellement basé sur celui du jeune protagoniste à la tête de son exploitation. Une musique extradiégétique très minimaliste est utilisée pour aider le spectateur à entrer dans la tête du personnage, à souligner le genre, et cela est efficace. Tout comme un titre de Action Bronson, artiste musical de Hip-Hop, qui apparait à la fin du film, permettant de se décoller des clichés du monde paysan. Le réalisateur n’hésite pas à citer le film Alien comme référence directe à une scène de vêlage dans laquelle il a voulu introduire cette figure de monstruosité dans une histoire d’amour véritable entre un paysan et ses vaches. Des sentiments si forts qui poussent Pierre à se persuader qu’il attrape la maladie de ses vaches. L’homme et l’animal ne font plus qu’un. L’aspect psychosomatique est à son paroxysme et cela touche le spectateur.

Pierre (Swann Arlaud) et Pascale (Sara Giraudeau).

On en ressort ému, touché, et ébahi, par le talent grandiose d’Hubert Charuel pour un premier film. Ainsi que celui de Swann Arlaud et Sara Giraudeau dans les rôles respectifs de Pierre et de Pascale, sa sœur. Ces deux acteurs, ne connaissaient rien au monde agricole et se sont adaptés d’une manière sans équivoque et très impressionnante. Les Césars du meilleur premier film, meilleur acteur, et meilleure actrice dans un second rôle sont amplement mérités et annoncent une carrière fulgurante pour Hubert Charuel que l’on suivra avec une attention toute particulière.